Le soir du 8 novembre 1939, à Munich, dans la brasserie Bürgerbräukeller, Hitler fête l’anniversaire de son putsch raté de 1923. À 13 minutes près, il aurait été tué et le monde n’aurait été que plus heureux… et plus encombré.
C’est dans ce même lieu, que 16 ans plus tôt, le jeune et déjà fougueux Hitler, alors chef du parti national-socialiste des travailleurs allemand accompagné par le général Erich Ludendorff pénètrent dans la brasserie Bügerbraükeller où se déroule une réunion de soutien à Gustav von Kahr pour annoncer le renversement du gouvernement bavarois. Avec ce coup de bluff, Hitler comptait rallier von Kahr et réussir son putsch. Peine perdue, il finit au cachot pour 14 mois. Une période d’emprisonnement mise à profit pour la rédaction de sa diatribe enflammée et haineuse, Mein Kampf.
Dix ans plus tard, Hitler accède à la Chancellerie, à la tête du gouvernement allemand, et depuis, chaque année il célèbre le putsch raté dans cette même brasserie.
Mais pour l’anniversaire de 1939, le Führer va échapper ce soir-là à une bombe destinée à le tuer et du même coup à changer la face du monde.
Georg Elser, un humble menuisier originaire du petit village de Hermaringen, dans le Jura souabe, veut profiter de l’occasion pour assassiner le Führer dont, plus lucide que la plupart de ses contemporains, il a mesuré la malfaisance.
Il ne lui suffit pas de s’opposer en silence, en refusant par exemple le salut nazi. Dans une solitude totale, il décide d’agir par lui-même.
Ayant observé que chaque année, Hitler célèbre l’anniversaire du putsch de la Brasserie, il s’établit dès l’été 1939 à Munich et fabrique lui-même une bombe à retardement en usant de son savoir-faire en horlogerie.
Pour s’habituer à la brasserie, Georg devient un client régulier. Il y va régulièrement dîner, et ayant repéré les lieux il s’y laisse enfermer la nuit afin de préparer la cachette de la bombe. Deux jours avant la célébration annuelle, il y dépose la bombe…
Le 8 novembre, comme prévu, Hitler se présente à la brasserie, entouré de la plupart des principaux dignitaires nazis.
Mais comme il a hâte de revenir à Berlin, il abrège son discours et quitte les lieux plus tôt que prévu, à 21h07, soit 13 minutes précisément avant l’explosion de la bombe.
13 minutes ont décidé du futur de l’Europe et du monde.
La bombe explose inutilement, provoque l’effondrement d’une partie du local, faisant huit morts et 63 blessés.
Très vite, en analysant les restes de la bombe, la police de Himmler identifie les fournisseurs de Georg Elser et retrouve son atelier.
Le menuisier est arrêté le soir même alors qu’il tente de franchir la frontière suisse. Après quatorze heures d’interrogatoire et de torture, il avoue avoir posé la bombe, mais persiste à nier toute complicité face aux policiers qui n’en croient pas leurs oreilles et suspectent les services secrets britanniques.
Hitler demande que le prisonnier soit conservé en vie jusqu’à la fin de la guerre, dans l’attente d’un procès à grand spectacle destiné à magnifier le nazisme. En attendant, il est déporté au camp de concentration d’Orianenburg-Sachsenhausen, près de Berlin, puis transféré à Dachau, et il y reste jusqu’à la fin de la guerre.
Le 9 avril 1945, sachant que tout est perdu, alors qu’il est sur le point de se suicider après avoir mené son pays au chaos, Hitler n’oublie pas son hôte de Dachau, il donne par téléphone l’ordre express d’exécuter le « prisonnier spécial » avant de se donner la mort.